Khirbet Dûsaq

De Archéologie au Proche-Orient
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Géolocalisation

<googlemap version="0.9" lat="30.52076" lon="35.61611" zoom="11"> 30.52076,35.61611 Khirbet Dūsaq </googlemap>

Khirbet Dūsaq, exemple d’un bain médiéval dans un ensemble princier de Jordanie du sud

Le site de Khirbet Dūsaq (30°31'14.75 N/35°36’58 E) est localisé à environ 6 km à l'Est du château de Shawbak, au Sud de la route nationale conduisant à Ma’ân. Établi à une altitude de 1278 m, il domine le cours du Wâdî al-Nijil. La base de données archéologique JADIS indique pour ce site de période indéterminée, ne posséder aucune information et bibliographie, mentionnant uniquement des structures de murs. Son intérêt nous a été signalé par un chercheur français, M. Cédric Devais.

Le complexe architectural est orienté est-ouest, il se divise en trois corps de bâtiment. Deux bâtiments (A et B) parallèles de plans rectangulaires à l’ouest et un grand corps long au nord (bâtiment C).

Après les repérages et prospections menés en 2008, une première campagne de fouille a été menée sur le site en mai 2009. Pour des raisons de coût et de temps, l’intervention a été alors concentrée sur une série de sondages répartis en deux secteurs de fouille, l’un sur une probable citerne du type bassin ouvert ou birka devant le bâtiment A, l’autre sur le bâtiment C où l’on présumait l’existence d’un bain. Les résultats de cette première campagne ont révélé comme le soupçonnait l’équipe un ensemble architectural de grande qualité.

La mission était composée de quatre membres :

  • René Elter, Archéologue, architecte EA 1132 HISCANT-MA, Université de Nancy 2, France
  • Jean-Paul Pascual, Historien, Ifpo, Directeur de recherches CNRS, responsable de la mission
  • Élodie Vigouroux, Archéologue, doctorante à Paris IV-Sorbonne et chercheuse associée à l'Ifpo

M. Mohammed al-Marahleh était le représentant du Département des Antiquités jordaniennes.

La mission a pu être menée grâce à un soutien financier de l’ANR Balnéorient complété par une aide de l’Ifpo.

Résultats de la campagne 2009

Les fouilles ont mis au jour dans le premier secteur un bassin de plan carré couvrant une surface de près de 65 m2. Il est délimité par un pourtour de pierre marbrière aux tonalités rougeâtres et ses parois sont couvertes de mortier hydraulique. Ce bassin se développe à l’avant d'un bâtiment quadrangulaire (A) de type iwan ouvert vers l’est. Cet espace s’ouvrait sur le bassin par un arc brisé appareillé en calcaire fin portant un décor en dents-de-scie ; la baie  était vraisemblablement encadrée de piédroits moulurés dont nous avons mis au jour quelques blocs.

Mais c’est dans le deuxième secteur que les résultats sont les plus spectaculaires et vont au-delà des espérances des chercheurs. Le sondage sur le bâtiment du bain (bâtiment C) met au jour une partie de la pièce chaude (l’autre partie est toujours enfouie). L’espace est conservé sur plus de 2,50 m de hauteur, jusqu’à la naissance de la voûte qui le couvrait.

Dans une niche à l’origine couverte d’un arc en plein cintre mouluré en grande partie détruit, mais que l’on peut restituer, un bassin en pierre de taille finement sculptée de décor d’entrelacs floraux et géométriques (fig. 6), recevait l’eau chaude. L’eau provenait de réservoir et cuve révélés par la fouille à l’arrière de la niche. La pièce et la cuve étaient chauffées par un système de type canal de chauffe et plancher suspendu (suspensura et hypocauste) connu depuis l’Antiquité. Le sol de la salle chaude, en partie pillé, était couvert d’un pavement en opus sectile de dalle en pierre marbrière blanche de grand appareil. Les parois encore en élévation ont conservé une grande partie de leurs parements. Le bas des élévations en contact avec de l’eau est couvert d’un enduit enrichi de fins fragments de tuiles, les parties supérieures d’un enduit plus fin et de meilleure qualité architecturale. Les voûtes étaient couvertes d’un matériau s’apparentant au stuc. Elles présentaient un décor incisé aux motifs curvilignes. De nombreux blocs et fragments de blocs architecturaux ont également été mis au jour. Certains présentent un décor de conque et de pseudo muqarnas.

Perspectives

Les indices de datation demeurent cependant faibles. La corrélation des données provenant de l’étude de la céramique et des éléments et espaces architecturaux tend pour une datation des vestiges des périodes ayyoubide et mamelouke. Poursuivre la fouille dans le reste du ḥammām dont la structure de chauffe est intacte, notamment la salle de déshabillage, et étendre les sondages au bâtiment B, mais également à des parties du site dont la stratigraphie est conservée, nous permettrait de préciser la datation et la fonction de ce complexe qui apparaît unique dans le Bilâd al-Shâm médiéval : un pavillon de plaisance dans une campagne qui, selon les sources littéraires médiévales, connaît une certaine prospérité aux XIIIe-XIVe siècles

Bibliographie

  • Brünnow Rudolf Ernst, Domaszewski Alfred von, Die Provincia Arabia, vol. I, Strasbourg, 1904.
  • Hill Gray, « A Journey to Petra », Quarterly Statement of the Palestine Exploration Fund, 1897, p. 34-44, 135-144.
  • March Chrystelle, Pascual Jean-Paul, « Le complexe de Khirbet Dûsaq (Shawbak) », in Actes du colloque Balnéorient, organisé à Amman en 2008, à paraître.
  • Mauss Christophe E., Sauvaire Henri , « Voyage de Jérusalem à Kérak et Chaubak », in Duc de Luynes, Voyages d’exploration à la Mer Morte, à Pétra et sur la rive gauche du Jourdain, 3 vol., Paris Arthus Bertrand, 1864-1866, vol. 2, p. 83-178.
  • Meistermann François J. , Guide du Nil au Jourdain par le Sinaï et Petra, A. Picard et fils éditeurs, Paris, 1909.
  • Musil Alois, Arabia Petraea, II, Edom, Topographischer Reisebericht, 1. Teil, Wien, Kaiserliche Akademie der Wissenschaften, 1907.
  • Vigouroux Elodie, Elter René, Pascual Jean-Paul, March Chrystelle, « Khirbet Dūsaq, exemple d’un bain médiéval dans un ensemble princier de Jordanie du sud, Premiers résultats de la campagne 2009 », in Actes du colloque Balnéorient organisé à Damas en 2009, à paraître.